Il y a quelques semaines, j’ai publié un article discutant des éléments qui font automatiquement baisser mon intérêt pour une histoire. Vous pouvez le lire en cliquant ici. Je vous en reparle aujourd’hui parce que seulement quelques heures après la sortie du texte, une étonnante coïncidence s’est produite. J’ai décidé de vous la partager en petite anecdote !
Le 7 février, ma mère et moi avons déniché une pile de vieux livres à trier en espérant trouver des exemplaires à donner ou à garder. Pendant qu’on les classait, ma mère commentait mon article récemment publié, discutant des points qui y étaient abordés. Si vous l’avez lu, vous vous souvenez peut-être du deuxième sujet évoqué : les scènes avec un miroir au début d’un roman, c’est-à-dire la méthode la plus paresseuse de commencer une histoire. Elle trouvait que c’était un point intéressant et m’a partagé qu’elle ne l’avait encore jamais remarqué.
Le prochain livre à me tomber sous la main était un exemplaire de 50 nuances de Grey par E.L. James. Je ne l’avais pas lu, mais je savais que son écriture était considérée comme étant l’une des plus mauvaises selon la majorité des critiques littéraires. J’ai donc décidé de lire sa première page pour en avoir un aperçu. La phrase d’introduction était la suivante :
« Je grimace dans le miroir, exaspérée. »
S’en suivait une description du physique de la femme en tête de l’histoire.
Reconnaissant ce moment comme étant une merveilleuse coïncidence, j’ai éclaté de rire et j’ai pu montrer à ma mère l’exemple courant de l’utilisation de cette méthode. Le moment n’aurait pas pu être plus approprié !
Depuis, je suis tombée sur plusieurs autres romans qui ont fait subir le même sort à leur première page. C’est un phénomène très courant dans le monde de la littérature, et ces nombreuses rencontres m’ont fait reconnaître que j’aurais sûrement dû me plonger dans le sujet un peu plus profondément dans mon article de février. J’ai donc décidé d’inclure deux autres exemples du miroir utilisé au début d’une histoire :
Divergent par Veronica Roth
Chez moi, il y a un miroir. Il se trouve à l’étage sur le palier, derrière un panneau coulissant. Les règles de notre faction m’autorisent à m’y regarder le deuxième jour de chaque trimestre, quand ma mère me coupe les cheveux. […] Dans le miroir, je vois un visage étroit, des grands yeux ronds et un nez aquilin. J’ai toujours l’air d’une petite fille, pourtant je viens d’avoir seize ans.
Dans la première oeuvre de sa populaire saga, Veronica Roth utilise la technique du miroir non seulement pour présenter aux lecteurs l’apparence de la fille principale, mais aussi pour introduire le concept des factions. Pour cette deuxième raison, le début du roman rehausse un peu sa qualité — même si au final, je considère que ça aurait pu être mieux construit afin d’éviter une si forte impression de déjà-vu.
Intérieur nuit par Marisha Pessl
L’énorme lustre déversait une lumière dorée sur les invités tandis que j’observais la fête dans le miroir en bronze au-dessus de la cheminée. Je fus étonné de repérer quelqu’un que je reconnus à peine : moi-même. Chemise bleue, veste en tweed, troisième ou quatrième verre — je n’arrivais plus à les compter —, adossé contre le mur comme si c’était moi qui le soutenais. On dirait que je n’étais pas à un cocktail, mais dans un aéroport, à attendre que ma vie décolle.
En ce qui concerne ce premier extrait du roman Intérieur nuit, j’ai été heureuse d’y trouver une certaine variante de la méthode du miroir : la description qui est offerte concerne uniquement des facteurs de circonstances — soit la situation du personnage et son état d’esprit — contrairement à des aspects physiques tels que la couleur des yeux ou des cheveux. Après avoir lu le paragraphe, je ne savais toujours pas à quoi ressemblait l’homme puisque Marisha Pessl avait choisi de seulement mettre en valeur des détails qui approfondissaient le contexte. Je considère que c’est une utilisation réussie de la méthode.
La technique du miroir emprunte différentes formes à travers le monde littéraire : elle utilise parfois une flaque d’eau, une vitre de train ou de voiture, un objet qui reflète une image… Dans tous les cas, son objectif principal est celui de présenter une information physique à propos d’un personnage. Certains auteurs réussissent à la transformer en lui donnant une raison d’être qui est originale et significative ; d’autres l’utilisent par manque d’imagination.
Ça c’est cocasse !